Vivre ici

Ti amo, Bordeaux !

À moins que vous ne viviez dans une grotte (celles du Parc de Majolan sont très sympas ceci dit), vous n’avez pu passer à côté de l’info-miam de ce mois de novembre : Bordeaux S.O Good, le rendez-vous des fins gourmets, revient bichonner nos papilles du 16 au 18 novembre. Avec un invité des plus prestigieux en nos palais : l’Italie !

Il faut dire qu’au pays du canelé et du canard confit, la pasta occupe une place de choix. Le tapis rouge était donc évident à dérouler… Pour faire honneur à ce pays cher au cœur des Bordelais, nous avons rencontré deux concitoyens de la métropole originaires d’Italie, qui ont accepté de nous donner leur regard sur la ville, leurs bonnes adresses, leurs souvenirs…

« Sarà perché Ti amo Bordeaux », avec la cultivée Luciana M. Morgera, qui tient le blog "La Bella Bordeaux", et le Maestro Salvatore Caputo, directeur du Chœur de l’Opéra National de Bordeaux.

Quiconque a déjà été au moins une fois en Italie, que ce soit à Rome, Florence ou encore Venise, a forcément été marqué par l’omniprésence de l’art à chaque coin de rue. Musique, peinture, architecture : la beauté suinte de partout ! Tout comme les saveurs, à l’heure de l’Aperitivo…

Ce n’est pas un hasard si les deux franco-italiens que nous avons rencontrés portent un regard très poétique sur Bordeaux, et travaillent chacun sans se connaître dans un secteur culturel qu’ils estiment tous deux très prolifique en Nouvelle-Aquitaine.

Luciana, « La Bella Bordeaux »

« Quand on n’est pas né dans une ville, mais que le cœur l’a choisie, on a forcément un regard différent, et on y voit des choses auxquelles les natifs ne prêtent plus attention… »

Luciana Morgera est née à Naples, a longtemps vécu à Florence, puis a choisi Bordeaux. Elle y vit depuis plus de dix ans maintenant, avec sa famille, et organise des événements dans le secteur artistique et culturel, après avoir longtemps travaillé dans le domaine de la mode en Italie. Son blog propose un regard bien particulier sur Bordeaux…

Italie à Bordeaux Luciana Morgera

Pourquoi être venue vivre à Bordeaux ?

« Avec mon mari, nous avions tous les deux l’impression d’avoir fait le tour professionnellement en Italie. Il nous fallait un nouveau défi ! Nous savions d’emblée que notre nouvelle vie serait en France. Pour des petites choses que nous avons appréciées à chacune de nos venues : le côté brocante, l’art de vivre, le fait que l’on puisse voyager facilement avec notre chien. Nous souhaitions deux choses : une région active pour rebâtir une carrière, et proche de ce que l’on avait du mal à quitter en Toscane, à savoir la culture, la bonne bouffe et le vin ! On a hésité entre Bourgogne, Champagne ou Bordelais : ce fut Bordeaux ! »

Quel premier souvenir gardez-vous de votre installation bordelaise ?

« Lors de notre première visite pour s’installer dans la région, nous avons passé un week-end à Saint-Emilion. La beauté de cet endroit fut comme un rêve… Nous avons vécu quelques premières années autour du village, avec mon mari et mes enfants, puis nous sommes venus à Bordeaux même. J’y ai lancé un concept d’expos éphémères, et j’ai plongé à 100 % dans le milieu de la culture bordelaise. »

Italie à Bordeaux photo : Vincent Bengold

En tant qu’Italienne, quel regard portez-vous sur Bordeaux ?

« Nous avons peut-être un regard plus artistique sur les choses. Je porte aussi un grand intérêt aux gens et aux rencontres, parce que quand tu arrives dans une ville, venant d’un autre pays, les autres sont essentiels à ton intégration.

Après plus de dix ans maintenant, je peux le dire : j’aime profondément Bordeaux, et les gens que j’ai pu croiser ici. Et j’ai réalisé que tout ce qui me relie à la ville a un lien à la culture : mon métier, mes amis, mes engagements, mes loisirs. Alors, j'ai créé un blog pour en parler, "La Bella Bordeaux", avec un triple objectif : donner envie aux italiens de venir (le site est bilingue), parler aux italiens vivant à Bordeaux, et donner aux Bordelais un regard différent sur leur ville. J’ai de nombreux retours, car les Bordelais aiment beaucoup l’Italie. »

Italie à Bordeaux photo : David Remazeilles

Y’a-t-il un endroit à Bordeaux qui vous fait penser à l’Italie ?

« Forcément : le Palais Gallien ! Mais les similitudes que je retrouve sont plutôt dans un état d’esprit, une ambiance générale qui me rappelle Florence et Naples : celui des terrasses, du fait que les gens sortent, sont souvent dehors. Il y a un calendrier de choses à faire, en dehors de chez soi, assez dense à Bordeaux, entre les expos, les manifestations, les apéros… La douceur de vivre fait aussi que l’on se déplace beaucoup à vélo. Comme en Italie, on vit dehors ! »

Revenons à la gastronomie : où manger italien à Bordeaux ?

« Il faut aller chez Da Luigi, rue du Pas-Saint-Georges. Il est arrivé à Bordeaux en même temps que ma famille d’ailleurs, on le connaît très bien ! Je venais de louer un appartement juste à coté quand il a ouvert son premier restaurant, et il m’a alpaguée dans la rue pour me faire goûter sa mozzarella… sans savoir qu’il serait jugé par une compatriote ! J’aime aussi Chez Mimi et Tripletta, mais Da Luigi c’est la référence. »

Italie à Bordeaux crédit : Osteria Da Luigi

Et à l’inverse, où réservez-vous pour faire découvrir la gastronomie bordelaise à vos amis italiens quand ils viennent vous voir ?

« J’ai deux chouchous : le Calixte au Bouscat, c’est bon, beau et on s’y sent bien. Et la Brasserie l'Orléans, où règne une ambiance très bordelaise, à l’ancienne, un peu vintage. »

Allez, lâchez-vous : quelles sont les hérésies culinaires qui vous énervent le plus quand un Bordelais se met à cuisiner italien ?

« Les pâtes trop cuites, les mélanges bizarres sur les pizzas, le Spritz Campari-soda (ça, c'est très grave !), la crème dans les pâtes alla carbonara… (rires) Par contre, je trouve que les connaissances sur la gastronomie italienne en France ont changé ! On fait de plus en plus les vraies recettes, on recherche les bons produits (la base de la cuisine italienne). »

Italie à Bordeaux crédit : Brasserie L'Orléans

Vos trois lieux incontournables à recommander à un italien en première visite à Bordeaux ?

« J’ai un faible pour le Musée des Beaux-Arts et le Musée des Arts décoratifs et du Design, pour tous les musées bordelais en fait (le CAPC, la Base Sous Marine…) ; Ensuite, un site atypique comme Le Garage Moderne ou les Vivres de l’Art, pour le côté arty décalé très bordelais ; Enfin, le monument incontournable pour moi est la Cathédrale Pey Berland, sous l’angle de la rue Vital Carles. Ça a un charme spécial, cette vue… »

Vous nous révélez quel sera votre prochain coup de cœur bordelais sur La Bella Bordeaux ?

« Mon prochain article sera sur le danseur Marc-Emmanuel Zanoli, dont le grand-père est italien. C’est un artiste très généreux, qui a créé « le Ballet de Poche ». »

Question « cerise-sur-le-tiramisu » : citez-nous un(e) italien(ne) à faire découvrir aux bordelais :

« Sans hésitation le musicien Alex Golino, un saxophoniste jazz que j’ai rencontré il y a 10 ans… chez Luigi ! Le monde est petit… figurez-vous qu’il a fait ses études à Boston avec mon frère, et je le rencontre à Bordeaux ! »

Retrouvez les aventures italo-bordelaises de Luciana sur son blog labellabordeaux.fr  

Cour du Madd photo : Fleur Griffon

Salvatore, Chef de Chœur de l’Opéra National de Bordeaux :

« Bordeaux m’a donné l’impression que tout était possible, que tous les rêves sont réalisables… »

Salvatore Caputo est un personnage ! Quand il nous décrit son Bordeaux, c’est tout un poème, au point que l’on réalise par ses mots la chance que l’on a de baigner dans une telle douceur de vivre. Intégré grâce à la musique, il a à cœur de partager avec le plus grand nombre ce savoir et cette passion, au Grand-Théâtre comme dans les lieux les plus insolites de la ville. En avant Maestro !

Italie à Bordeaux crédit : Roberto Giostra

Pourquoi avez-vous choisi de vivre à Bordeaux ?

« Il y avait un concours international pour devenir chef du Chœur de l’Opéra National de Bordeaux ; J’avais travaillé dix ans en Italie, cinq ans à Buenos Aires, et j’avais très envie de venir en France, pour la culture, l’idée de liberté et de respect pour les autres. Ce sont des idéaux que l’on considère nés en France, nous Italiens. C’était en 2014, et je suis arrivé la veille du concours dans cette ville que je ne connaissais pas. J’ai fait une longue balade sur les quais au soleil couchant, qui m’a fait tomber totalement amoureux de Bordeaux ! J’ai gagné le concours, et je suis resté.

J’ai tout de suite aimé la mentalité bordelaise au sujet de la culture : avec l’Opéra et la ville, j’ai pu rapidement développer des projets qui me tiennent à cœur, pour partager la musique avec le plus grand nombre, via des conférences. À Bordeaux, mais aussi dans les villes alentours et plus largement dans la région. Je suis originaire d’un petit village à 200 km de Naples, je trouve cela important de faire profiter de la culture d’une ville à ses alentours ! »

Italie à Bordeaux photo : Eric Bouloumié

Votre premier souvenir après vous être définitivement installé à Bordeaux ?

« Je revois mes enfants, à la fin de leur premier jour d’école, dire au revoir à leurs nouveaux amis. Nous avions un peu peur qu’ils aient du mal à s’intégrer, mais dès le premier jour, ils se sont fait plein de copains. Et en trois mois, ils ont maîtrisé la langue. Bordeaux, ce fut un choix positif pour toute ma famille. »

Quels sont pour vous les trois Incontournables bordelais, à faire découvrir à des Italiens en visite à Bordeaux ?

« J’aime beaucoup la cathédrale Pey Berland et les quais ; Mais de manière générale, ce que j’aime faire découvrir à ma famille italienne en visite, c’est Bordeaux par le tram. On peut tout visiter en tram à Bordeaux, et le fait que ce tram soit si beau, avec les fils cachés sous la terre, cela donne une vraie élégance à la ville.

Il y a deux photos que j’adore prendre, qui représentent bien l’idée du mariage du passé et du futur pour moi : le tram descendant le cours Vital Carles, avec la rosace de la cathédrale en fond le soir (NDLR : comme Luciana, ce n’est pas un hasard…), et le tram qui passe délicatement devant les colonnes du Grand-Théâtre. »

Italie à Bordeaux photo : Nicolas Duffaure

Y a-t-il des endroits à Bordeaux qui vous rappellent l’Italie ?

« Les quais de Garonne, comme cette première balade faite la veille du concours ! Car dans mon village italien, l’eau du fleuve qui coulait à côté configurait totalement la vie des habitants. Quand je me promène en famille le long du fleuve à Bordeaux, cela me rappelle mes origines… Il y a aussi une autre raison : je trouve qu’ils symbolisent le fait qu’avec intelligence, on peut transformer le visage d’une ville.

Avant, on appelait Bordeaux « la belle endormie », les quais étaient fermés, sombres. Aujourd’hui, ils symbolisent l’ouverture de Bordeaux au monde et sa beauté, alors cela fait écho en moi : une balade sur les quais rappelle qu’à tout moment, on est en pouvoir de réaliser ses rêves, faire bouger les idées reçues et changer de vie. Le port est désormais au centre de la ville, et la Place de la Bourse est une des rares places ouvertes dans le monde… »

week-end à Bordeaux photo : Vincent Bengold

Votre métier, c’est la musique : avez-vous déjà chanté dans des lieux insolites bordelais ? Vous nous racontez ?

« Je donne souvent des conférences à la Bibliothèque Mériadeck, et nous avons fait une flashmob là-bas avec le Chœur. J’aime ce lieu, car on y trouve tous les âges, tous les publics, et il représente bien mes valeurs parce que la bibliothèque rend accessible gratuitement la culture à tout le monde.

Dernièrement, nous avons aussi chanté par surprise au beau milieu de la Piscine Judaïque. Les nageurs étaient très surpris ! J’aime chanter avec le Chœur dans ce genre d’endroits populaires, car cela permet d’amener la musique classique à des Bordelais qui n’osent peut-être pas venir au Grand-Théâtre, alors que le monument est tellement beau.

Et puis j’aime aussi l’idée de peut-être toucher profondément ne serait-ce qu’une seule personne qui ne connaissait pas la musique classique avant. À la piscine Judaïque par exemple, il y a un petit garçon qui est venu nous voir à la fin, c’était la première fois qu’il entendait ce genre de musique d’opéra. Il m’a dit, avec les yeux qui brillent « je ne savais pas qu’on pouvait chanter comme ça ».

Je ne sais pas ce qu’il fera plus tard dans sa vie, mais l’idée d’avoir pu juste lui donner envie de s’intéresser à quelque chose qui lui était étranger, c’est important pour moi. C’est peut-être une manière de rendre à Bordeaux le bel accueil que j’y ai trouvé… »

Un lieu emblématique de Bordeaux où vous rêvez justement de chanter avec le Chœur ?

« Au marché des Capucins ! J’aimerais chanter un répertoire en langue arabe dans ce quartier où les communautés musulmanes sont très présentes. »

Escale du livre 2018 photo : Pierre Planchenault

Votre bonne adresse italienne gourmande à Bordeaux ?

« Da Luigi, c’est un napolitain dont la cuisine est la plus proche de la gastronomie italienne selon moi : les produits sont 100 % italiens, il les importe des meilleurs producteurs.

L’autre restaurant que j’aime beaucoup, et qui cuisine comme en Italie, c’est Elio’s Ristorante. C’est une cuisine très régionale, de Sardaigne, très typique. »

Quel fut votre premier coup de cœur gastronomique en arrivant à Bordeaux ?

« Cette petite chose que vous appelez « canelé » ! Et le vin, forcément… Ce qui est bien à Bordeaux, c’est que c’est vraiment le pays du vin, dans le sens où l’on produit du bon vin, mais aussi où l’on peut découvrir tous les vins du monde dans les bars à vin, restaurants, et à la Cité du Vin. »

Quel est, selon vous, la plus grande différence entre la cuisine bordelaise et la cuisine italienne ?

« La cuisine bordelaise et française, de manière générale, accorde une grande importance à la présentation. La cuisine italienne est plus généreuse, et place le goût avant une présentation soignée. »

Suivre l’actualité de Salvatore au Chœur de l’Opéra de Bordeaux : www.opera-bordeaux.com

photo : Pierre Planchenault

Ce que l’on retient ? Que Luigi va voir son carnet de bal considérablement se remplir, et que le cours Vital Carles et la rosace de la Cathédrale sont très « italian-friendly ».

La cinquième édition de Bordeaux S.O Good s’attache à offrir, comme à son habitude, un programme original et varié.

Cette année, la programmation se lit comme une recette de cuisine composée de précieux ingrédients. Les Chefs, les producteurs, les artisans, les commerçants, les restaurants et les artistes en sont les acteurs engagés et font de Bordeaux S.O Good un festival assurément joyeux et convivial.

Pour vous mettre dans l'ambiance, voici notre playlist 100 % Italo-pop !

Italie à Bordeaux pexels
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